Rien de nouveau, mais prometteur pour autant!
Le généticien russe Denis Rebrikov affirme que les Chinois n’ont réalisé aucune avancée fondamentale dans la modification de l’embryon humain. Ils ont dépassé tout le monde car personne avant eux n'avait osé donner naissance à des enfants génétiquement modifiés. D'un point de vue scientifique, les Chinois n’ont réalisé aucune avancée fondamentale. La fécondation in vitro (FIV) est utilisée en médecine depuis de nombreuses années et, rien qu'en 2017, pas moins de 3 000 publications scientifiques ont été publiées sur le recours à la modification du génome grâce à la technique CRISPR. Selon le scientifique, techniquement parlant, le groupe de chercheurs russes aurait pu transférer des embryons et faire naître un enfant génétiquement modifié bien avant les Chinois, mais les médecins russes ont préféré opter pour la voie lente, s’assurant à plusieurs reprises que la technique employée soit sans danger.
Récemment, le chercheur He Jiankui de Shenzhen, en Chine, a annoncé qu'il était capable de créer les premiers gens génétiquement modifiés au monde. Il a modifié l'ADN de jumeaux afin de permettre aux enfants de pouvoir résister à une éventuelle infection au VIH. Le généticien a modifié les embryons de sept couples au cours de leur traitement de l'infertilité. Au final, seule une grossesse a été obtenue. Selon lui, le but n'était pas de guérir ou de prévenir une maladie héréditaire, mais d'essayer de donner aux enfants une capacité que seuls certains d’entre eux possèdent naturellement. En utilisant l'outil d'édition de gène CRISPR-Cas9, le chercheur a désactivé le gène CCR5, celui-là même qui forme un passage protéique permettant au VIH de pénétrer dans les cellules.
Le vice-recteur à la recherche de l’Université de médecine nationale russe, Pirogov Denis Rebrikov, et ses collègues ont publié les travaux d’une étude similaire au cours de laquelle des embryons résistants au VIH ont été créés. A présent, cette équipe se prépare à transférer l’embryon modifié à sa mère.
Le développement rapide des technologies CRISPR au cours des dernières années a considérablement élargi la portée de leur application et a contribué à l’avancement de la pratique clinique. La modification du génome des cellules T CD4 + par inactivation ou modification du gène du récepteur à C-C chimiokine de type 5 (CCR5) a donné des résultats encourageants dans le traitement de l'infection par le VIH-1.
Cependant, outre le changement du gène CCR5 dans les cellules T (pour bloquer le développement du SIDA chez les patients infectés par le VIH), la création de l'allèle CCR5delta32 peut être utilisée dans le cadre d’une fécondation in vitro (FIV) pour protéger le fœtus des femmes infectées par le VIH présentant une réponse faible au traitement antirétroviral.
L'introduction du système CRISPR-Cas9 au stade zygote permet de modifier le génome de presque toutes les cellules du corps, ce qui a déjà été démontré pour plusieurs maladies héréditaires. Il est important de noter que le génome modifié sera transmis aux générations suivantes. Une modification identique à l'allèle naturel CCR5delta32 protégera potentiellement le fœtus contre l'infection par le VIH au cours de son développement intro-utérin et durant l’accouchement. Autre effet positif: l’être humain pourrait devenir résistant à l’infection par le VIH jusqu’à la fin de sa vie. Les généticiens russes ont optimisé le système CRISPR-Cas9 afin de créer une délétion homozygote de 32 nucléotides (similaire à l'allèle naturel CCR5delta32) dans la phase S d'un zygote humain. Des zygotes présentant un nombre anormal de pronucleus et ne pouvant être utilisés dans des programmes de fécondation in vitro (FIV) ont été utilisés pour éditer le génome.
L'étude a été approuvée par le comité d'éthique du Centre National Koulakov de Recherche Médicale dans le domaine de l'obstétrie, la gynécologie et la périnatologie (protocole n ° 2017/45). Toutes les étapes de l’étude (méthodes) ont été réalisées dans le strict respect des principes et règles internationales applicables au travail sur les embryons. Tous les couples mariés qui ont fait don de leurs zygotes anormaux ont donné leur consentement informé et écrit à la réalisation de cette étude. L'étude concernait des couples dans lesquels les deux partenaires n’avaient pas d’allèle CCR5delta32.
L’édition du génome du zygote humain par l’intermédiaire de CRISPR-Cas9 est une méthode efficace pour modifier l’ADN intracellulaire. Elle a permit d’éliminer presque 100% de la séquence originale de plus de la moitié des embryons étudiés. Les résultats ont été corrélés avec d'autres cas d'utilisation de systèmes d'édition du génome, démontrant une efficacité élevée comparable.
Au cours des deux dernières années, le développement et la mise à jour des systèmes d’édition du génome ont été extrêmement rapides. Cependant, le principal problème aujourd'hui est le degré d'activité non-ciblée des systèmes d'édition du génome. Ces méthodes ne peuvent faire l’objet d’une pratique clinique que s’il a été prouvé formellement qu’elles sont sans danger.
Article basé sur les travaux de l’Université nationale russe de recherche médicale Pirogov